Appel à communications

28e Congrès de la SERCIA

Interroger les marges du cinéma et des séries anglophones

Organisé par Céline Murillo (Université Paris 13), Mehdi Achouche (Université Paris 13), Anne-Marie Paquet Deyris (Université Paris Nanterre), Nicole Cloarec (Université de Rennes)

6-8 septembre, 2023

Campus Condorcet, Aubervilliers, Université Paris 13, France

Appel à communications

 

Conférencier.e invité.e        

Joan Hawkins (Indiana University)            

Jeffrey Sconce (Northwestern University)

 

Il y a près de 25 ans, Jean-Loup Bourget dans son ouvrage majeur intitulé La Norme et la marge[i], soulignait le fait que les marges se définissent par rapport à des normes qui ne cessent d'évoluer dans un processus dialectique et dynamique. Pour Bourget, la marge est la somme de ceux qui refusent de se plier aux règles ou aux conventions, qu'il appelle la norme. Cette norme occupait une grande partie de son étude, et restait relativement facile à identifier, car héritée du système du cinéma classique hollywoodien.

Ce ne serait plus le cas aujourd'hui : c'est pourquoi cette conférence se concentre directement sur les marges du cinéma et des séries anglophones. Ce que l’on entend par la norme et ses marges a considérablement évolué depuis la naissance du cinéma et leurs définitions respectives varient, même si ce que l’on appelle communément films et séries grand public est très souvent défini en termes économiques, la norme ici étant associée aux intérêts financiers, visant à toucher un public le plus large possible pour générer des profits substantiels.

Cette conférence est consacrée à l’étude de ce qui se passe à la périphérie, dans les marges qui entourent le cinéma grand public, qui, selon Thomas Elsaesser, peuvent même être considérées comme plusieurs marges concentriques[ii]. Une approche similaire peut s'appliquer aux séries télévisées anglophones grand public et aux séries marginales à leur périphérie[iii].

 

Films et séries des marges

Ces marges peuvent être envisagées comme des espaces où les films et les séries sont créés, produits et distribués. Elles coïncident en partie avec des minorités et des groupes socialement marginalisés dont la production et les pratiques cinématographiques et télévisuelles sont exclues des circuits principaux et se trouvent recréées dans d'autres espaces et sous d’autres formes. Les films issus des communautés autochtones sont un bon exemple de la manière dont les groupes marginalisés peuvent produire des films et également créer de nouveaux systèmes de distribution et de consommation. Les études comparant des films anglophones à des films d’autres aires linguistiques sont également bienvenues, et celles portant sur des films où l’anglais n’est pas la seule langue.

            Nous voulons également nous pencher sur la marge sui-generis des cinéastes "alternatifs" ou des producteurs de séries, qui, dès le départ, définissent la marge en termes filmiques. Ils se positionnent en réaction, voire en opposition, au courant dominant, tant sur le plan de la production que de l'esthétique. Ils comprennent, entre autres, les cinémas underground, off-Hollywood, B, Z, d’exploitation, et même, dans une certaine mesure, le cinéma indépendant.

            Le fait de ne pas pouvoir profiter de la publicité et des canaux de distribution traditionnels a conduit certaines marges du cinéma et de la télévision à créer des réseaux alternatifs -utilisant aujourd'hui des ressources en ligne, comme Filmmakers Coop aux États-Unis et au Royaume-Uni[iv]. Un autre exemple de transformation est celui du cinéma d'art et d'essai Lux à Londres, devenu la plateforme digitale de cinéma marginal Lux Online. On pourra également aborder la question des sites de cinéma alternatif comme Ubuweb film, voire des réseaux cooptés comme Karagarga.

 

Représentations à la marge

Les marges du cinéma hégémonique sont également liées à l'esthétique. Dans quelle mesure ces films et séries s'appuient-ils sur les éléments constitutifs des films grand public tels que les personnages, un univers fictionnel voire une intrigue tout en refusant une narration classique qui s’accompagne d’exigences de cohérence et de savoir-faire qui sont prônées par les studios ? Certaines œuvres peuvent transformer le refus et le contournement des conventions en une pratique esthétique et politique de contestation et de résistance, même s’il reste à démontrer  à quel point elles sont « radicales» ou « underground ». Un exemple serait celui des films punk/No Wave new-yorkais qui cherchaient à défier et à perturber la bien-pensance de la société bourgeoise américaine dans les années 1970[v]. Certaines séries et émissions de télévision s'inscrivent dans la même tendance, comme celles  produites notamment par la télévision câblée new-yorkaise de cette période ou par la télévision anglaise des années soixante telles que The Prisoner (Patrick McGoohan 1967-68)[vi].

Cependant, de nombreux films situés à la marge esthétique et commerciale du cinéma anglophone, comme les films d'exploitation, de série B ou de série Z[vii], ne revendiquent pas d’ambition politique. Ces films, libérés des contraintes du bon goût, ramèneraient le cinéma à ses racines spectaculaires tout en l'éloignant des pratiques cinématographiques normatives. En ce sens, leur simple existence peut être considérée comme politique, notamment quand ils acquièrent un statut culte, et que leur esthétique trash inspire à son tour des œuvres d’avant-garde ou même  grand public.

 

Interroger les marges du cinéma et des séries anglophones

               Ce congrès invite à l'analyse des films et des séries anglophones situés dans les marges.Les approches peuvent être d’ordre économique
et/ou esthétique, en passant par une perspective historique et l'étude des modes de production et de distribution. Les études comparatives de films
en anglais avec des films dans d'autres langues sont également les bienvenues,de même que celles sur des films dans lesquels l'anglais n'est pas
la seule langue parlée.

               Veuillez noter que cette conférence ne traite pas les sujets liés à la représentation des marges et des groupes marginaux à moins qu'ils ne couvrent également l'une des perspectives critiques mentionnées ci-dessus.

 

Autres thèmes et sujets suggérés :

-Approche historiographique des marges en termes de production, de distribution et de réception, en relation avec la constitution de filmographies nationales ;

- Analyse diachronique des limites entre les marges et le courant dominant ;

-Étude des caractéristiques de ce qui sépare le courant dominant de la marge ;

-Influence des changements techniques sur les marges ;

            -Production cinématographique des groupes marginalisés ;

-Plateformes de streaming à la marge ;

-Théorie du premier, deuxième, troisième et quatrième cinéma

-Films exiliques, diasporiques, indigène et leur utilisation de la langue anglaise[viii] ; 

-Similitudes esthétiques entre les différents types de films et de séries marginaux ;

-Journaux cinématographiques et autres formes de films amateurs.

- Étude des fanzines et autres presses alternatives portant sur les cinéma et la télévision des marges

-Communication entre les différents groupes produisant du cinéma et des séries marginaux.

 

Les propositions de communication (300 à 500 mots, en anglais ou en français, accompagnées d’une courte bio-bibliographie de 150 mots) sont à envoyer avant le 5 mai à l’adresse suivante : sercia2023margins@gmail.com



[i] Jean-Loup Bourget, Hollywood, la norme et la marge (Paris: Nathan, 1998).

[ii] Thomas Elsaesser, “Hyper-, Retro- or Counter-: European Cinema as Third Cinema between Hollywood and Art Cinema [1992],” in European Cinema, Face to Face with Hollywood (Amsterdam University Press, 2005), 464–82, https://www.jstor.org/stable/j.ctt46n11c.37.Fernando Solanas and Octavio Getino, “Toward a Third Cinema,” Cinéaste 4, no. 3 (1970): 1–10.

[iii] Kate Coyer, Tony Dowmunt, et Alan Fountain, The Alternative Media Handbook, 1st edition (London & New York: Routledge, 2008).

[iv] Kristen Alfaro, “Access and the Experimental Film: New Technologies and Anthology Film Archives’ Institutionalization of the Avant-Garde,” The Moving Image: The Journal of the Association of Moving Image Archivists 12, no. 1 (2012): 44–64, doi:10.5749/movingimage.12.1.0044.

[v]  Stacy Thompson, “Punk Cinema,” in New Punk Cinema (Edinburgh University Press, 2005), 21–38.

[vi] Richard Dyer MacCann, “SIGHTINGS: Alternative Television: The British Model,” The American Scholar 43, no. 4 (1974): 650–56.

[vii] Joan Hawkins, “Midnight Sex-Horror Movies and The Downtown Avant-garde,” Defining Cult Movies: The Cultural Politics of Oppositional Tastes, (ed. Mark Jancovich et al, Manchester University Press, 2003), 223–34.

[viii] Hamid Naficy, An Accented Cinema:  Exilic and Diasporic Filmmaking (Princeton (N.J.): Princeton university press, 2001).

Personnes connectées : 2 Vie privée
Chargement...